Aucune disposition légale ne fixe les conditions de validité de la clause de non-concurrence.
Celles-ci ont été définies au fil des ans par la jurisprudence de la Chambre sociale de la Cour de cassation qui n’a eu de cesse de construire et façonner le cadre juridique de la clause de non-concurrence.
Ce sont notamment les juges de la Haute juridiction, qui par trois arrêt du 10 juillet 2002, ont posé les conditions de validité de la clause de non-concurrence, à savoir :
- être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise,
- être limité dans le temps et dans l’espace,
- prévoir une contrepartie financière versée au salarié (Cass. Soc. 10 juil 2002 n° 99-43.344 ; Cass. Soc. 10 juil. 2002 n° 00-45.135 ; Cass. Soc. 10 juil. 2002 n° 00-45.387).
Après avoir posé les conditions cumulatives de validité de la clause, la Chambre Sociale s’est attachée à déterminer les contours des conditions de renonciation de la clause de non concurrence.
En pratique, les dispositions relatives à l’interdiction de non-concurrence sont contenues dans le contrat de travail ou la convention collective. Ce sont ces mêmes dispositions qui fixent les règles relatives aux délais et formalisme à respecter par l’employeur s’il souhaite renoncer à l’application de la clause.
Par un arrêt rendu le 21 janvier 2015, la Cour de cassation affirme que de telles dispositions doivent néanmoins être ignorées lorsque le salarié est dispensé d’effectuer son préavis (Cass. Soc., 21 janvier 2015, n°13-24.471).
Dans cette affaire une société avait embauché un salarié en qualité de directeur régional.
Un avenant au contrat de travail prévoyait une clause de non-concurrence dont l’employeur pouvait se libérer à tout moment au cours de l’exécution du contrat ou au plus tard un mois après la notification de la rupture du contrat de travail.
L’employeur a licencié le salarié le 24 avril 2008 en le dispensant d’exécuter son préavis.
Le 14 mai 2008 l’employeur lui notifie sa décision de renoncer à l’obligation de non-concurrence.
Estimant que la levée de la clause était tardive, le salarié a saisi la juridiction prud’homale afin d’obtenir le versement de la contrepartie pécuniaire.
Par un attendu de principe au visa de l’article 1134 du Code civil la Cour de cassation a jugé que :
« Attendu qu’en cas de rupture du contrat de travail avec dispense d’exécution du préavis par le salarié, la date à partir de laquelle celui-ci est tenu de respecter l’obligation de non-concurrence, la date d’exigibilité de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence et la date à compter de laquelle doit être déterminée la période de référence pour le calcul de cette indemnité sont celles du départ effectif de l’entreprise ; qu’il en résulta que l’employeur qui dispense le salarié de l’exécution de son préavis doit, s’il entend renoncer à l’exécution de la clause de non-concurrence, le faire au plus tard à la date du départ effectif de l’intéressé, nonobstant stipulations ou dispositions contraires ».
Ainsi en cas de dispense de préavis, la Cour de cassation juge qu’il appartient à l’employeur de renoncer à l’exécution de la clause de non-concurrence au plus tard au départ effectif de l’intéressé de l’entreprise, peu importe les stipulations ou dispositions contraires.
Il en résulte que l’employeur n’a plus la possibilité de renoncer à l’exécution de la clause de non-concurrence après le départ effectif du salarié de l’entreprise, et ce même si la convention collective applicable ou le contrat de travail en dispose autrement.
La Chambre social fait ainsi échapper à la volonté de l’employeur toute possibilité de renonciation de ladite clause au-delà du jour du départ effectif du salarié de l’entreprise.
Cet arrêt constitue une nouvelle illustration de la position extrêmement protectrice de la Chambre sociale de la Cour de cassation à l’égard du salarié.
Cette décision fait surtout écho à un arrêt précédent de la chambre sociale de la Cour de cassation laquelle a adopté une position identique dans le cadre de la levée de la clause de non-concurrence durant le préavis non exécuté d’un salarié ayant démissionné (Cass. Soc., 13 mars 2013, n°11-21150).
Cette jurisprudence appelle les employeurs à la plus grande vigilance quant aux délais de renonciation des clauses de non-concurrence. En effet une levée irrégulière de l’obligation de non-concurrence peut s’avérer très coûteuse pour l’employeur qui sera tenu de procéder au versement de l’indemnité de non-concurrence.
Il est préférable d’affirmer la date de notification de la rupture du contrat de travail, comme délai butoir de renonciation à la clause de non-concurrence, quelle que soit la situation du salarié au regard du préavis et ce, afin d’éviter de voir la renonciation déclarée irrégulière par les juges du fond.