Le temps est compté pour les derniers contribuables possédant un compte à l’étranger non déclaré et qui désirent se mettre en conformité avec les règles fiscales à moindre coût.
Selon le montant des avoirs détenus à l’étranger, la note pouvait être salée du fait de l’amende pour défaut de déclaration de compte dont le montant correspond à un pourcentage du solde du compte de 1,5 à 5 % selon les cas et applicable sur les quatre dernières années.
Le Conseil Constitutionnel ayant abrogé cette amende, seuls des intérêts de retard et des majorations pour manquement délibéré sont applicables en plus des impositions supplémentaires d’impôt sur le revenu et d’ISF.
Face au manque à gagner, Bercy prépare pour le prochain collectif budgétaire de fin d’année une nouvelle amende de substitution et vient de durcir les conditions de la circulaire Cazeneuve.
De plus, avec l’entrée en vigueur dès 2017-2018 de l’échange automatique d’informations bancaires entre Etats, la cellule de régularisation a vocation à fermer.
1- L’amende proportionnelle pour compte étranger non déclaré abrogée
Par une décision n° 2016-554 QPC du 22 juillet 2016, le Conseil constitutionnel a censuré les dispositions de l’article 1736 IV-2 alinéa 2 du CGI qui prévoient une amende proportionnelle à hauteur de 5 % du montant des avoirs étrangers non déclarés, à l’encontre des contribuables n’ayant pas déclaré leurs comptes ouverts, utilisés ou clos à l’étranger sur lesquels le total des avoirs est égal ou supérieur à 50 000 €.
En effet, les Sages ont estimé que l’amende pour absence de déclaration de compte fixée en pourcentage du solde du compte non déclaré constitue une sanction manifestement disproportionnée qui méconnait le principe de proportionnalité des peines, dans la mesure où cette sanction est encourue même lorsque les sommes n’ont pas été soustraites frauduleusement à l’impôt.
Par conséquent, le Conseil Constitutionnel a abrogé ces dispositions, supprimant ainsi l’amende proportionnelle à compter du 24 juillet 2016.
Cette décision ne vise cependant que le deuxième alinéa du paragraphe IV-2 de l’article 1736 du CGI.
Les dispositions relatives aux trusts ou contrats d’assurance-vie étrangers non déclarés prévus à l’article 1736 IV bis du CGI ne sont pas visés par la décision du Conseil Constitutionnel du 22 juillet dernier. Ainsi, la détention d’un compte ou contrat d’assurance-vie par l’intermédiaire d’un trust ou d’une structure assimilée restent lourdement sanctionnés à savoir 7,5 % et 12,5 % depuis 2013.
Toutefois, le Conseil Constitutionnel a été saisi par une question prioritaire de constitutionnalité et devrait donc se prononcer, dans un délai de six mois, sur la question de l’inconstitutionnalité de l’amende proportionnelle applicable aux trusts ou contrats d’assurance-vie étrangers non déclarés. Très logiquement, les Sages devraient rendre une décision dans le même sens et sur les mêmes fondements que celle rendue le 22 juillet dernier.
2- Une probable nouvelle amende pour compte étranger non déclaré d’ici la fin d’année accompagnée d’un durcissement de la Circulaire Cazeneuve
Suite à la décision du Conseil Constitutionnel, il est fort à parier qu’une nouvelle amende soit instituée dans les projets de loi de finances de fin d’année pour se substituer à celle de 5% déclarée inconstitutionnelle.
Bercy a d’ores et déjà modifié la circulaire Cazeneuve, en date du 14 septembre 2016 et alourdi les majorations pour manquement délibéré, lesquelles passent de 15% à 25% pour les fraudeurs « passifs », c’est-à-dire ayant hérité d’un compte à l’étranger ou qui ne résidaient pas fiscalement en France lors de la constitution des avoirs à l’étranger, et de 30% à 35% pour les fraudeurs « actifs ».
Le secrétaire d’Etat au Budget, Christian Eckert, a précisé que ce durcissement des pénalités visait à compenser les pertes budgétaires liées à la décision du Conseil constitutionnel annulant l’amende de 5% sur les comptes non déclarés.
Bien qu’alourdi, le barème de la circulaire Cazeneuve reste néanmoins plus avantageux que celui qui est appliqué lors d’un contrôle fiscal pouvant aller de 40% à 80% selon les situations.
Les contribuables détenant un compte bancaire à l’étranger et non déclaré à ce jour ont donc tout intérêt à se mettre en règle rapidement s’ils veulent pouvoir bénéficier des dispositions de la circulaire Cazeneuve.
3- La fermeture prochaine de la cellule de régularisation par la mise en place de l’échange automatique
Par ailleurs, le Service de Traitement des Déclarations Rectificatives (STDR) instauré en juin 2013, par la circulaire Cazeneuve, devrait fermer prochainement, au plus tard en 2018. En effet, à compter du 1er janvier 2017, l’échange automatique d’informations bancaires entrera en vigueur dans un certain nombre d’Etats, avant d’être généralisé à compter du 1er janvier 2018.
A compter de 2017-2018, l’échange automatique d’information sera applicable dans plus d’une centaine de pays, dont certains sont réputés pour leur secret bancaire tels que la Suisse, Israël, Jersey, les Bahamas, les Bermudes ou les Îles Caïmans.
L’OCDE a élaboré une norme d’échange automatique d’informations bancaires aux termes de laquelle les banques et institutions financières au sein desquelles des comptes bancaires ont été ouverts par des non-résidents, y compris à travers des structures interposées, transmettront le montant tous types de revenus d’investissement, (intérêts, dividendes, revenus de contrats d’assurance vie etc) mais aussi les soldes de comptes et produits de ventes d’actifs financiers à leur administration fiscale, qui transmettra ces informations à l’administration fiscale des pays de résidence des détenteurs de comptes.
Ainsi, l’administration fiscale française sera en mesure de connaitre, chaque année, pour les avoirs détenus par des résidents français dans une banque située dans un pays ayant conclu une convention d’échange automatique de renseignements non seulement le montant des intérêts et dividendes perçus, mais aussi le montant des avoirs détenus et montant des cessions des valeurs mobilières.
L’administration fiscale française aura donc accès automatiquement aux données bancaires collectées auprès des administrations fiscales des Etats signataires de la norme OCDE. Elle pourra donc procéder à des redressements fiscaux et appliquer les pénalités de droit commun, à savoir une majoration pour manquement délibéré de 40 % pouvant atteindre 80 % si elle estime que les contribuables ont réalisé des manœuvres frauduleuses.
En plus des sanctions fiscales, les fraudeurs encourent également un risque pénal. En effet, si l’administration fiscale détecte une fraude fiscale, elle peut engager des poursuites pénales après avis de la commission des infractions fiscales. L’auteur d’une fraude fiscale encourt jusqu’à 500 000 € d’amende et 5 ans d’emprisonnement.
Ces peines peuvent être portées à 2 000 000 € d’amende et 7 ans d’emprisonnement lorsque les faits ont été commis en bande organisée ou grâce à l’ouverture de comptes ou à la souscription de contrats auprès d’organismes établis à l’étranger, l’interposition de personnes ou d’organismes écran établis à l’étranger, l’usage d’une fausse identité ou de faux documents (ou toute autre falsification), une domiciliation ou un acte fictif ou artificiel à l’étranger.
Par conséquent, les contribuables disposant d’avoirs sur des comptes à l’étranger non-déclarés, soit directement, soit par l’intermédiaire d’une structure, et qui n’ont pas encore déposé de dossier de régularisation ont tout intérêt à le faire le plus rapidement possible. A l’heure actuelle, le STDR n’applique plus l’amende proportionnelle. Toutefois, la législation devrait se durcir à compter du 1er janvier 2017 avec le nouveau collectif budgétaire. De plus, la cellule de régularisation devrait très prochainement fermée, au plus tard avec l’entrée en vigueur de l’échange automatique d’informations bancaires entre Etats.
Avis aux retardataires, dernier appel pour ceux qui souhaitent régulariser dans des conditions optimales.