Les avances en comptes courant dans le régime mère-fille et la notion de risque excessif

Le Conseil d’Etat a posé le principe de la possible immixtion de l’Administration Fiscale dans la régularité des avances consenties par une société mère à sa filiale (CE, 11 juin 2014, n°363168).

Par cette décision, la Haute Juridiction a précisé qu’il ne suffisait pas l’aspect commercial d’une telle opération. En d’autres termes, il convient de déterminer, outre la contrepartie commerciale, si l’avance consentie par la société mère ne constitue pas pour elle un risque manifestement excessif, malgré sa rémunération normale.

L’Administration ne peut néanmoins apprécier le risque excessif qu’au seul regard de l’intérêt de l’entreprise. Elle ne peut en revanche pas se prononcer sur l’opportunité d’un choix décidé par les dirigeants, qui relève d’une gestion purement interne sur laquelle l’Administration ne dispose pas d’un droit de regard.

La décision d’espèce, rendue en deuxième cassation, n’est cependant pas une décision à portée générale dans la mesure où elle cantonne l’application de la notion de risque excessif à des circonstances particulières et non fréquentes et ne retient pas cette notion dans le cas d’espèce, malgré les pertes financières importantes causées par les avances consenties.

Cette position est conforme au courant jurisprudentiel en vertu duquel les juges ont toujours été d’une extrême prudence en la matière, malgré la tendance des services vérificateurs à caractériser, sans discernement, la théorie de l’acte anormal de gestion.

Pratiquement, deux éléments sont pour que le risque pris constitue un acte anormal de gestion. Premièrement, il convient d’établir l’existence du risque et son excès probable, l’entrepreneur n’agissant plus dans l’intérêt de l’entreprise. Deuxièmement, le dirigeant doit avoir délibérément agi contrairement à l’intérêt de son entreprise.

Ainsi, les opérations que le dirigeant décide de mener au nom de son entreprise, tout en sachant que celle-ci prend un risque de devoir supporter certaines charges ne constitue pas nécessairement un acte anormal de gestion. La notion de risque excessif, conduisant à l’application de la théorie de l’acte anormal de gestion, ne pourra être retenue que si les opérations ont été décidées dans des objectifs étrangers à ceux de l’entreprise.

Cette décision met en avant les critères d’analyse qui doivent être pris en compte : capacité de l’entreprise à mobiliser les fonds placés, objet du placement, information disponible au jour de l’opération, évolution dans le cadre d’une situation normale et risque manifestement exagéré et non pas simplement élevé.